Petite Ourse de la Pauvreté de Lucien Suel par Jacques Barbaut

Les Parutions

11 avril
2012

Petite Ourse de la Pauvreté de Lucien Suel par Jacques Barbaut

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   Petite Ourse de la Pauvreté, de Lucien Suel, dont le premier (courbures cervicale, thoracique et lombaire, sacrum et coccyx) et le dernier (Ultime arithmogramme) texte blasonnent Ivar Ch’Vavar, l’auteur-compilateur de Cadavre grand m’a raconté, « anthologie des fous et des crétins du Nord de la France » (Le Corridor bleu, 2005, 362 p., épuisé), poète aux plus de cent hétéronymes,
   accueille en vers justifiés
    (les vers justifiés sont des vers comprenant un même nombre de signes — y compris les espaces —, ils se composent de préférence en police Courier New, ce qui permet un parfait équilibre des… justifications, précisément : le « m » et le « i », par exemple, et leurs approches, occupant la même chasse),
   pour leur rendre hommage et les célébrer, sept personnages,
   Ch’Vavar, le grand vivant, épine dorsale, étoile Polaire ; Georges Bernanos et Mouchette, l’une de ses « héroïnes » ; Fleury Verbrugghe, le grand-père de l’auteur ; Benoît-Joseph Labre, errant canonisé, saint protecteur des célibataires, des mendiants et des sans domicile fixe, et les deux peintres médiumniques Augustin Lesage et Fleury-Joseph Crépin (futurs fleurons du musée d’Art brut de Lausanne),
   dont la singularité qui les réunit est d’avoir, chacun, vécu dans le Pas-de-Calais
    (quatre y sont nés : Amettes, 1748 ; Hénin-Liétard, 1875 ; Saint-Pierre-lez-Auchel, 1876 ; Berck, 1951 — ainsi que Suel himself : Guarbecque, 1947),
   ce département français situé tout en haut à gauche sur la carte, qui possède de loin le record du nombre de communes avec 895 (à comparer avec Paris : 1), d’Ablain-Saint-Nazaire, Ablainzevelle, Acheville, Achicourt… à … Zoteux, Zouafques, Zudausques, Zutkerque,
   et dont la disposition géomancique forme une constellation, « la Petite Casserole », pour/dans le ciel de Suel.

   Déployant des trésors d’associations et d’images, faisant surgir, en un « Mastaba » majestueux et pourtant chatoyant, pour illustrer la geste du chaman des corons, le mineur de fond Augustin Lesage — « Barbu Cosmogonique / SALUT À TOI » —, celui-là même qui entendit au fond d’une veine, à l’fosse, une voix lui intimant l’ordre d’acheter pinceaux, couleurs et toiles,
   terrils et pyramides, fiers obélisques et chefs-d’œuvre de symétrie, fresques de Haute Égypte et liste hautement comique des pharaons et de leurs dynasties, acrostiches et palindromes, virtuosité et enquête biographique,
   ce recueil,
    tout en empathie et tendresse pour les humbles, les naïfs et les purs, les doux porteurs de message, illuminés ou mystiques, les guidés-par-les-anges, les guérisseurs et spirites, les tarés, les faibles, les exclus —
   « le voyageur déguenillé, / le roi de la gyrovagie, / le cul-terreux volatil, / le paresseux persécuté, / le trappiste itinérant, / le rouquin lentigineux, / le contemplatif zen » —,
   leur édifie — à chacun sa mesure — de sensibles « tombeaux » qui sont autant de « palais idéaux », conférant une nouvelle acception pleine et entière à l’expression « œuvre justifiée ».

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