Ce qui m'agite par Alex Saliceti

Les Incitations

16 oct.
2020

Ce qui m'agite par Alex Saliceti

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« La mer apportera à chaque homme des raisons d’espérer, comme le sommeil apporte son lot de rêves. »Christophe Colomb

           Le temps me tue, l'espace me sauve.

Atteindre quelque chose de foncièrement grand, au sein même de l’intime. Quelque chose de lyrique au cœur du quotidien. Puisqu'au sein du pessimisme radical généré par le temps se niche l’infini de l’espace, qui le tempère et me fait admettre ma disparition.

Être de province, c’est être îlien ; peu importe la province et peu importe l’île.

Singularité, irréductibilité, absolu, sentiment de perte, les habitants des rivages sont souvent traversés par un mouvement pendulaire entre envie de départ et nostalgie du retour, comme si l'identité géographique ne prenait son plein sens que dans l’exil.
Et cette dialectique permet de voir ce qui déchire : l’appel du large et la quiétude du foyer,
le désir d’inconnu et la nostalgie des images familières, la soif d’aventure et la douceur du quotidien.
                                Hestia et Hermès

Porter le deuil de ce que l’on ne connaît pas, rendre compte de ce qui ne se dit pas.

Puisque les arts plastiques ont tout à voir avec la poésie, et fort peu avec la prose.
Avec « L’idée de construire un roman comme on fait un puzzle, avec de petites pièces »
             Georges Perec

 

Alors, faire avec

 

le quatre pour baliser l’espace
l‘usagé et le clinquant pour le temps
le mur en déférence à la peinture
l’horizon pour obsession
la méditerranée en héritage
le mythe et le signe comme véhicules
le départ et le retour en bandoulière
et l’immensité dans l’intime pour projet.

 

            

Mais Hermès m'a quitté et Hestia m'a viré

 

2020 année maudite de déluge et de feu
où tous mes enfants ont disparu

Je ne peux donc plus que présenter un projet commémoratif, virtuel mais férocement
monumental

 

« Allez les petits »

 

C’est un fait. Même pour tout passant moyennement lucide, l’Art Monumental Urbain est aux squares et aux jardins ce que le point est à la ligne : terminé, passons à autre chose. Seuls les monuments aux morts des carrefours, qu’ils soient discrets ou ostentatoires, possèdent une charge spécifiquement commémorative génériquement liée à un style totalitaire, leur conférant une incongruité frisant l’indécence, sans pour autant que leur présence défrise qui que ce soit.

C’est pourquoi, dans le souci civiquement louable de redonner à la production des œuvres monumentales tout à la fois une signification forte et une esthétique d’actualité, nous proposons une œuvre dont l’inauguration, solennelle et empreinte d’une gravité toute municipale serait ainsi relatée : « Le nouveau jardin public, en travaux depuis de longs mois, est enfin terminé… Avec à son entrée le cénotaphe dédié « AUX ENFANTS MORTS AU JEU »…Vaste monument - comme un cercueil vertical – fait de l’empilement de centaines de petits, parfois entrouverts, dans lesquels leurs images reposent. Puis, la cérémonie d’inauguration : bouteille de grenadine balançant au bout de la flèche de grue pour aller se fracasser sur l’entrouverture sommitale… Claquement sec du couvercle, suivi dans la foulée par tous les autres. « Adieu ! Adieu ! et sans rancune ! » reprend le chœur profond des parents-passants amassés, là où, à présent, le calme est à son comble et l’émotion à l’aise. 

C’est ainsi que la Quotidienneté Répétitive du Passant Anodin Certifierait la Dévotion Quiète des Présents pour les Trépassés du Futur dans la Permanence Artistique des Pompes Funéraires.

 

Le commentaire de sitaudis.fr

L'artiste Alex Saliceti vient de perdre toutes ses œuvres dans l'incendie d'un garde-meubles à Marseille.