Revue 591, n° 6 par Jean-Marc Baillieu

Les Parutions

20 sept.
2019

Revue 591, n° 6 par Jean-Marc Baillieu

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      Enfin une revue d’avant-garde ! Il était temps, car « la langue n’est pas une superstructure sur une base » (I.V. Djougatchvili), et le progrès est en marche comme l’attestent les récentes nominations comme présidentes de Marie Darrieussecq (commission d’avance sur recettes cinématographiques) et de Cécile Mainardi (commission Poésie du CNL) : des femmes prennent de la voix, des voix, et il est bienvenu de proposer à l’orée d’une livraison de revue : Exode, exil, ou transhumance des voix de femme ; la Quête du « Grâave » , un article séminal de la psychanalyste et anthropologue Claire Gillie qui piste ce « Que serait ce cantus obscurior au féminin » (de Cicéron à Claude Maillard), et dont on appréciera aussi - autre registre : La petite chaise de monsieur Seguin où elle examine la clinique « du dire des patients face à leur symptôme vocal » entre griot (photos pleine page), enfant muet sorcier et castration vocale. Voilà qui est susceptible d’ouvrir des voies entre théorie et praxis aux poètes curieux pratiquant voire privilégiant l’oralité sans ronronner, d’autant qu’entre ces deux textes est judicieusement repris un article (paru en 1975 à Neuchâtel –CH) de Marianne Ebel à propos de Théorie du récit de l’éminent Jean-Pierre Faye, dont le chapitre 1 (paru en 1970 dans Change 5) avait bousculé le cocotier : « le récit énonce l’action – et la produit ».

      Le ton est ainsi d’emblée donné à cette sixième livraison de 591, revue voulue internationale et dirigée par J-F Bory, revue qui, impeccablement rédactée-en-chef par christian (sans majuscule) Désagulier, a trouvé un rythme prégnant et singulièrement énergisant. Et ce n’est pas un hasard si trente pages éclairantes d’allophonhics du talentueux Luc Champagneur ont ici trouvé place : « Des jeunes récemment arrivés en métropole écrivent ce qu’ils peuvent qui leur vient aux doigts dans le cadre de leur apprentissage du français. » A cette aune, est bien fade la poésie de patronage du poétereau-paysagiste maniéré et académique (prix SGDL) Olivier Domerg dont trois extraits lourdingues le démasquent de plus cireur de pompes (dédicace à J-F Bory !). Heureusement, ce qui suit n’a rien à voir avec cette roupie de sansonnet, ainsi, à lire dans leurs langues avec intérêt et plaisir, Domenico Mennillo ( La Vita è Altrove), César Espinosa (trente pages de poésie visuelle internationale), Demostene Agrafiotis (The importance of the multiplicity of minor events) avant le Macrofilmde Jacques Siccard, puis 20 pages pénétrantes de Max Bense, une impeccable étude de Jean-Pierre Bobillot ( René Ghil : une anté-tradition futuro-lettriste), un clin d’œil à Isidore Isou, et des pistes de lecture ou d’écoute (Éthiopiques). Sans oublier, cerise sur le gâteau et effet Prozac© garanti, les trois textes aux p’tits oignons du sémillant directeur de cette incandescente revue.



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