Scum, un rêve de Denise Le Dantec par Jacques Barbaut

Les Parutions

23 janv.
2024

Scum, un rêve de Denise Le Dantec par Jacques Barbaut

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Scum, un rêve  de Denise Le Dantec

 

 

 

Rêver en couleurs. En noir & blanc. Rêver en odeurs. Rêver en 3D. En réalité augmentée. Dans une langue étrangère. Rêver en musique…

 

Denise Le Dantec, elle, c’est sain, c’est simple, rêve en images, fixes & animées, en poésie, en typographie, en « typoésie ».

 

Trois épigraphes ouvrent son ouvrage : Virginia Woolf, puis Valerie Solanas (Souvenez-vous que je suis la seule femme ici qui ne soit pas folle), puis V.W. (J’ai cette espèce de tournis dans la tête), à nouveau.

 

Du vent, des vagues, deux « V », Virginia & Valerie, double V, Woolf.

 

Scum, mot anglo-américain, pour « écume », « mousse » (verte des « piscines stagnantes »), « rebut », « crasse », « ordure », « salaud » (bastard, son of a bitch).

 

« L’eau de la rivière répète scum scum scum en dévalant le pâturage en friche. » (p. 13)

 

L’eau dans tous ses états, ses manifestations, ses métamorphoses physiques, rêveries liquides : fleuve, rivières, « cours d’eau limpides », terres humides, averses, « rafales de neige, de grêle et de neige fondue » et « océans de conversations ».

 

Des images que l’état de veille considérerait comme aberrantes : « Un peuple de poissons à graines de citrouille tient un concert mi latin mi vieil anglais. » (14) 

 

Scum est aussi le titre d’un pamphlet, d’un manifeste féministe dit « radical » (1967), qu’une agression — Valerie shoots Andy ! — à l’encontre de Warhol (Factory) rendra célèbre, qu’un raccourci a caricaturé / siglé / estampillé « émasculation ».

 

Scum, un rêve : mince plaquette de petit format et de moins de trente pages utiles — sur leurs surfaces tombe la neige, tournoie un cygne blanc, les nuages filent, se prépare une tempête.

 

Divers signes de ponctuation appellent (peut-être) « gravillons et graminées champêtres » ; des larmes (de plaisir), des virgules ; les points, les poissons ; de grandes parenthèses fermant, des oiseaux cachés parmi les roseaux. 

 

(Dans les Chansons du gibet, de Christian Morgenstern, la « Sérénade du poisson » était figurée par des parenthèses et des tirets avec cette indication : « se passe aisément de traduction ».)

 

(Pas ici, ailleurs, Denise Le Dantec, femme multiple — la page 30, « De la même auteure (extraits) », de Scum, un rêve, compte quarante-quatre titres —, évoque Mina Loy et son boxeur de mari, Valentine Hugo, Sophie Taeuber [Arp], Rosa Luxembourg botaniste, Louise Labé et Gertrude Stein.)

 

— Hello, Beauté !

 

Des fenêtres brillent — vitres d’un bleu acier profond.

 

Des énoncés sont soulignés — « Le chromosome Y (mâle) n’est qu’un chromosome X (femelle) incomplet » // Je me vois ni comme une femme / ni comme un homme — par des encadrés.

 

L’imminence d’un poignard.

 

UP YOUR ASS

 

Virginia crie.

 

Les fins sont tragiques, elles me font peur.

 

 

… on se réveille/se réveille-t-on ? au bord de « la rivière qui bouillonne ».

 

 

 

 

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