Forêt noire par Benjamin Fouché

Les Apparitions

Forêt noire par Benjamin Fouché

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Marchand de sable conceptuel. Il donne dans l’expérimental et verbalise des protocoles. Que peut un corps à l’heure du capitalisme tardif ? Comment défigurer une chambre trop étroite à cause de la hausse sauvage des loyers ? Il spécule à tout-va sur ce carré noir sur fond noir que le capital comprime : au bord du lit il réactive des chutes ratées dans le sommeil. Une prose déjà semi plastique remue, prenant presque forme au plafond : jeux de langage flottant somnolant ou phrases minimales qui passent par la tête avant de s’effondrer au sol : Qui cherche à dormir trouve une chambre / Qui dépeuple une forêt peuplera des murs /...

 

Parquet flottant. Cloisons à creuser. Il bricole comme il peut dans le noir une zone à étendre. Des agencements baignent avec le dehors : open-space ludique articulant différents volumes. En guise de plus-value du vert crémeux sur une vieille carte apparaît – ou peut-être une pâtisserie gâtée. Forêt Noire développe l’éco-consulting. La boîte défriche incube prospecte. Chambre à pièces variables ou plutôt boîte-galerie. Quelques phrases qu’on défiscalise au sol quelques formes in situ – mécénat disruptif :

 

ZAD au lit. Impressions fumigènes acryliques :

 

L’installation a été conçue comme une chambre à livre ouvert. Au plafond le visiteur pourra observer des feuilles suspendues entre deux strates temporelles. (Quatrièmes de couvertures vacillant au-dessus du sol). Mes formes épurées convoquent l’interagir elles transforment le dormeur en participant. C’est à lui d’activer cette possible forêt entre ante- et post-. Peuplée de pages en l’air comme ça :  

 

Forêt Noire
« Je lis déjà seul »
À partir de 8 ans

 

A l’infini. Tout simplement.

Aux murs un peu d'acrylique entrelace couleurs courbes éclaboussures : ronces noircies par l’air du dehors ravins qui flottent quelque part & pas mal d’ombre. Zéro symbole. On croit deviner qu’il s’agit d’une chambre ou d’un livre. On suit des traces en s’enfonçant. Que reste-t-il des premières lectures sous la couette ? Brumes. Souvenirs écrans. Odeur de fumigènes. Des draps ou des pages délimitent une ZAD. Ici on produit du fromage de chèvre bio et des masques anti-reconnaissance faciale.

 

 

Marx, la branche textile, ses fantômes. Bois sec montage sonore & gazette :

 

Un doigt sur une branche. Il la touche à peine tandis qu’une voix off passe en boucle. Elle dit qu’il faudrait très exactement 11674 ans à une ouvrière du textile bangladaise pour gagner le salaire annuel du PDG *** La voix off fait une pause puis ajoute qu’une filiale du PDG produit caleçons sweats pyjamas au Bangladesh. La voix off explique qu’elle a voulu traduire cette élasticité du flux temporel dans son lit… Eine Jahre. Eine Hose. Quelques bribes d’allemand et une petite ouvrière. Combien de caleçons quelle distance entre son visage qui s’échappe et ce doigt sur la branche qu’on ne ramassera plus ? La bangladaise devient une petite fille rhénane complétement oubliée depuis cent cinquante ans ses traces flottent encore entre les pages d’une gazette. Elle hante les murs de la chambre. Elle vole du bois mort devenu propriété privée.

 

 

Clichy crève l’écran. Chênes synthétiques lianes vidéo :

Des pixels jaunes de flammes crèvent le fond de la chambre. On devine des silhouettes derrière les murs des formes plutôt vagues caillassant un fourgon. Lettres INA en bas à droite. Gros plan sur un flic haut-parleur à la main : « rentrez chez vous bordel rentrez ». On se demande bien comment et pourquoi : des traces noires – arbres filiformes ? dépôts de fumée ? – effacent peu à peu moquette meubles et cloisons. Zéro chambre. On est enfermé dehors enveloppé par l’ombre d’enfants fuyant la police. On ne sort plus des images du 27-10-2005 on ne quitte plus les voitures qui crament dans la cité du Chêne Pointu. Selon moi, il y a toujours des morts au fond d’un bois sinon rien ne serait magique ou hanté. Chambre-écran envahie par des chênes des lianes. Quelqu’un crie : « Forêt noire partout justice nulle part ». Coups de matraques. On s’endort dans l’opacité des troncs.

Le commentaire de sitaudis.fr

Travail en cours.