Poèmes du départ, extrait par Arnaud Talhouarn

Les Apparitions

Poèmes du départ, extrait par Arnaud Talhouarn

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Je voudrais écrire quelque chose de contemporain. Mon écriture exhale une senteur d'ancien, de moisi. L'odeur douceâtre de la vieillerie littéraire, comparable à celle de billets de banque trop longtemps manipulés, écornés et froissés. 
Le remède ?

Tu attends, n'est-ce pas, tu attends cela est visible : mais qu'est-ce que tu attends ?
Observe à nouveau (encore, de nouveau et de nouveau : cela n'aura donc jamais de fin) l'écran de tes accessoires numériques. Relève le contenu de tes multiples messageries, toutes les heures, mais non cela est encore insuffisant : toutes les minutes, ce sera mieux, avec logé dans tes entrailles l'espoir d'y voir apparaître enfin les consignes du dieu qui te révélerait ce que, sans le savoir, tu n'as de cesse d'attendre.
Bon petit gestionnaire de tes comptes en banque et de tes projets de publication, impeccable recenseur des prochaines dates auxquelles auront lieu les prélèvements du fisc et les réunions des sociétés littéraires auxquelles tu appartiens, secrétaire personnel préposé au règlement méticuleux de ce qui t'est dû et de ce que tu dois, de ce que tu reçois et de ce que tu donnes : ne trouveras-tu donc jamais rien de mieux à faire de ton existence ?

J'écris en dehors de chez moi. Comme si l'écriture était une activité douteuse, possiblement nuisible, qu'il valait mieux tenir à distance du lieu de vie et des affaires quotidiennes.
Mesures d'hygiène ? Prophylaxie ?

Patientant chaque jour, gardant au cœur l'espoir que, la nuit venue, tu rassembles l'énergie éparpillée dans l'attente et parviennes à en faire la matière d'un unique, adéquat cri.

Penser à ce qui serait définitif.

 

Le commentaire de sitaudis.fr

Recueil à paraître.