Léon Deubel par Patrick Beurard-Valdoye
Un jour Léon Deubel m'est retombé dessus.
Mon ami Alexandre de la Riera me téléphone : Tu connais ? En effet, le poète Deubel, je connais.
Le lendemain il m'apporte un épais cahier défraîchi, que j'ouvre stupéfait : quinze lettres de la main de Deubel réunies, accompagnées d'articles sur sa fin tragique. Plus incroyable encore, Alexandre a ramassé ce cahier gorgé d'eau sous la pluie près d'une décharge publique d'un terrain vague. Devant l'état repoussant du document il a hésité. S'est tout de même dit qu'il le ferait sécher pour voir, et a découvert de la sorte pour la première fois ce nom.
Moi, je connais bien Deubel, originaire lui-aussi du Territoire de Belfort. La rue parallèle à celle où habitait ma grand-mère paternelle s'appelle rue-du-poète-Deubel. Je n'exclus pas l'éventualité que cette plaque ait compté dans mon parcours : la dénomination rue-du-poète-Deubel, ça peut amener un gamin à considérer qu'un poète est aussi illustre et nécessaire qu'un général, non ?
J'ai interrogé une myriade de confrères ou grands lecteurs. Deubel ? Inconnu. J'ai rencontré trois personnes qui connaissaient : le libraire Léon Aichelbaum, Michel Giroud, qui m'a aussitôt répondu : l'ami d'Edgar Varèse, et récemment « l'homme du son » Gilles Grand, pour le même motif. En effet les premières compositions de Varèse mettent en musique des sonnets de Deubel. Détruites. Je sais aussi que les bibliophiles s'y intéressent, et que de fantomatiques « amis de Léon Deubel » existeraient.
Deubel était considéré comme l'un des plus importants poètes de son vivant. Il s'est suicidé un jour de juin 1913, dans la Marne, âgé de 34 ans, à bout d'une vie de chien qu'il voulut consacrer entièrement à la poésie. Il n'eut de cesse qu'il repoussât l'offre familiale réitérée de métier d'épicier de luxe.
Disparu aussi après avoir pris soin de détruire ses manuscrits et sa correspondance.
Son œuvre - essentiellement de sonnets - publiée de son vivant confidentiellement, fut rééditée en 1914 au Mercure de France. On devine parfois la veine de Verlaine, ou celle de Laforgue, et celle des premiers expressionnistes allemands. Pierre-Jean Jouve salue avec ferveur sa disparition. Apollinaire l'évoque dans ses chroniques.
Et puis, à un moment, la chaîne de mémoire se rompt. Vous ne trouverez pas un vers disponible de Deubel en librairie.
Il reste toutefois la place Deubel à Paris.
Je me suis demandé : pourquoi ce cahier m'était tombé dessus ? Pourquoi moi ?
J'ai fait ce que j'avais à faire. Sans résultat pour le moment.
Tout est cependant prêt, sinon les éditeurs. Je possède même une lettre de Jean-Pierre Chevènement me confirmant qu'une grande exposition sur le grand poète sera organisée dans sa ville natale en 2003. Parole en l'air...
Parfois je consulte les lettres du cahier que m'a confié Alexandre. Quel combat pour l'exigence.
Mon ami Alexandre de la Riera me téléphone : Tu connais ? En effet, le poète Deubel, je connais.
Le lendemain il m'apporte un épais cahier défraîchi, que j'ouvre stupéfait : quinze lettres de la main de Deubel réunies, accompagnées d'articles sur sa fin tragique. Plus incroyable encore, Alexandre a ramassé ce cahier gorgé d'eau sous la pluie près d'une décharge publique d'un terrain vague. Devant l'état repoussant du document il a hésité. S'est tout de même dit qu'il le ferait sécher pour voir, et a découvert de la sorte pour la première fois ce nom.
Moi, je connais bien Deubel, originaire lui-aussi du Territoire de Belfort. La rue parallèle à celle où habitait ma grand-mère paternelle s'appelle rue-du-poète-Deubel. Je n'exclus pas l'éventualité que cette plaque ait compté dans mon parcours : la dénomination rue-du-poète-Deubel, ça peut amener un gamin à considérer qu'un poète est aussi illustre et nécessaire qu'un général, non ?
J'ai interrogé une myriade de confrères ou grands lecteurs. Deubel ? Inconnu. J'ai rencontré trois personnes qui connaissaient : le libraire Léon Aichelbaum, Michel Giroud, qui m'a aussitôt répondu : l'ami d'Edgar Varèse, et récemment « l'homme du son » Gilles Grand, pour le même motif. En effet les premières compositions de Varèse mettent en musique des sonnets de Deubel. Détruites. Je sais aussi que les bibliophiles s'y intéressent, et que de fantomatiques « amis de Léon Deubel » existeraient.
Deubel était considéré comme l'un des plus importants poètes de son vivant. Il s'est suicidé un jour de juin 1913, dans la Marne, âgé de 34 ans, à bout d'une vie de chien qu'il voulut consacrer entièrement à la poésie. Il n'eut de cesse qu'il repoussât l'offre familiale réitérée de métier d'épicier de luxe.
Disparu aussi après avoir pris soin de détruire ses manuscrits et sa correspondance.
Son œuvre - essentiellement de sonnets - publiée de son vivant confidentiellement, fut rééditée en 1914 au Mercure de France. On devine parfois la veine de Verlaine, ou celle de Laforgue, et celle des premiers expressionnistes allemands. Pierre-Jean Jouve salue avec ferveur sa disparition. Apollinaire l'évoque dans ses chroniques.
Et puis, à un moment, la chaîne de mémoire se rompt. Vous ne trouverez pas un vers disponible de Deubel en librairie.
Il reste toutefois la place Deubel à Paris.
Je me suis demandé : pourquoi ce cahier m'était tombé dessus ? Pourquoi moi ?
J'ai fait ce que j'avais à faire. Sans résultat pour le moment.
Tout est cependant prêt, sinon les éditeurs. Je possède même une lettre de Jean-Pierre Chevènement me confirmant qu'une grande exposition sur le grand poète sera organisée dans sa ville natale en 2003. Parole en l'air...
Parfois je consulte les lettres du cahier que m'a confié Alexandre. Quel combat pour l'exigence.