Sombre les détails de Guillaume Fayard par Antoine Hummel

Les Parutions

18 déc.
2005

Sombre les détails de Guillaume Fayard par Antoine Hummel

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Sombre les détails : LE texte hyperbare.


En finissant Sombre les détails, Guillaume Fayard n'a pas du se dire tout de suite qu'il avait produit un vrai texte déambulatoire complet et somptueux.
Il aura préféré prendre une bonne bière dans le frigo, un bon bain dans le bac à douche ou pourquoi pas - des gens aiment ça - jouer au ping-pong en récitant du Pennequin. Pourtant, le lecteur qui achève le dernier-né des éditions Le Quartanier se le dit, « putain de livre », il s'imagine même bientôt le relire, dans sa tête, s'en réciter des passages dans le métro en écoutant Quiet City - Pan American, autre joyau de l'Esprit Citadin merveilleusement assimilé, vraiment intériorisé.

Le texte a été élaboré dans sa première phase sur la plate-forme wiki du site Marelle et la prose qui s'y engage porte la trace de cette singulière genèse : travaillée « en réduction » et « en épaississement » à la fois, elle émet depuis un monde [d'élocution] régi par l'attention au détail. Elle chope le moindre pixel de réalité et en déploie le mystère (« sombre » = l'énigme à l'abord de chaque chose ?). En cela, il est possible qu'on se souvienne dans quelques années de Sombre les détails comme de la première application textuelle du filtre gaussien disponible sous Photoshop.
Le flou gaussien est, dans le monde digital, une technique qui revient à diffracter les éléments de base d'une image selon des critères de largeur et de hauteur : chaque pixel explose, déborde de lui-même, produit une confusion des formes. Le filtre gaussien pose en quelque sorte un masque de détail sur l'image. Or, Sombre Les Détails est un texte qui débonde son champ d'investigation ; on part du détail mais on n'y reste pas, le mouvement (l'effréné) agit comme facteur principal du flou produit :

Résulte en Pivote un Décale un Contour Un vernis un,
Contour Léger Autour des formes
Est perceptible

[... ]

Déborde, ne Me débordent
Pas simplement
Ne reste pas
Quel degré d'arrachement
Enceint, étire
Rapporte Ce qui Non, où, comment
Quel degré d'arrachement des ombres
Quel plissage Loin Méduse dans L'œil, fuite sous les
Remplissent bacs ou Lierres de Circonstances -



SLD est le texte instruit d'un lecteur de poésie attentif (on retrouve un usage de la majuscule comparable à celui de Philippe Beck : elle sert de relais syntaxique, c'est à la fois l'instrument du détail et de la confusion ; quelques traces du mentisme pennequinnien, aussi). Toujours en alerte, ouvert sur Circonstance, Sombre Les Détails, texte hyperbare, densifie le déjà-dense (la ville, la mer, la foule) entasse et comprime dans le même tissu sédimentaire tout ce que son errance citadine rencontre.

Des tonalités miennes Moins miennes Plus qu'autres
et Détachées


Et je dans tout ça... N'est-ce pas finalement le seul détail véritable ?




NB
Il faut également saluer le travail des éditions Le Quartanier et de leur revue, dont on s'apercevra bientôt - quand la diffusion sera bien réglée - de l'importance tétraphullonnaire dans la tréflière poétique contemporaine !...

- Le site du Quartanier : http://www.lequartanier.com/

- Le wiki Marelle, plate-forme très créative, hébergeur de works in progress :
http://marelle.cafewiki.org/

- Une lecture d'un extrait de SLD par l'auteur :
http://www.kilobytespatron.info/index.php?page=fayard
- Un texte de Guillaume Fayard sur LesCahiersdeBenjy :
http://www.20six.fr/LescahiersdeBenjy/archive/2005/08/23/172dgv41pzix2.htm
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