Membres fantômes / temps mêlés, Claude Favre par Christophe Esnault
- Partager sur :
- Partager sur Facebook
- Épingler sur Pinterest

La barque est trop chargée.
Vous avez raté l’actualité internationale des quinze dernières années. Ouganda, Kaboul, Syrie, Hongrie, Libye, Burkina Faso, Hiroshima, Istanbul, Zimbabwe, Mexique, Centre-Afrique, Calais, welcome. Petite remise à niveau ludique. Brillez dans les soirées grâce à vos notions de géopolitique, ses précisions. Beurrez des toasts d’horreurs au prochain vernissage, diversifiez, surprenez, tartinez, exhaustivité recommandée, « vider l’océan avec une cuillère ».
Et te souviens-tu de Géricault d’ahan à la morgue, observer des chairs, des cadavres la rigidité jusqu’à la décomposition, pour peindre inventer la suite, le vivant
On jouera avec le monde référentiel de l’auteure, avec des œuvres, un foisonnement.
Un être ou une anémone qui déborde de ce qu’elle sait, de ce qu’elle a vu et entendu, des atrocités et des violences.
Les lecteurs, dans un monde anxiogène, ont besoin d’un petit câlin, un moment de recueillement très doux, loin des guerres et des exactions. Supposément.
Je ne suis pas mis à mal ou pris à la gorge par les violences du monde évoquées dans les textes de Claude Favre. Elle est poète, là où d’autres se contentent d’être des êtres contents d'être contents, d’être au sommaire d’une anthologie de poètes sur le thème de La Résistance. Ou contents d’être soutenus par les copains. Je ne connais pas Claude Favre, je la rencontre dans le texte. Une rescapée. Claudicante, peut-être, mais vivante. Je la lis en dissidente dans un microsome en quête de reconnaissance auto-suffisante en vase-clos.
Dites-lui que j’ai rencontré sa pensée, son âme, son aura et son sacré.
Plus personne ne considère personne. Claude Favre est une rare. Une calcinée. Son écriture menée avec courage est un antidote aux falsifications, son cri est authentique et il est bien en lien avec ce qui accable des individus majoritairement indifférents, à ce qui tabasse l’aura de celle qui écrit, celle qui propose un texte urgent. Qui nous lave et nous nettoie des impostures et des poses.
La barque est trop chargée, mais c’est celle d’une Mandelstam en rage. Qui refuse de se taire. Qui témoigne de la catastrophe et de tous les incendies sur ses pupilles.
Le tourisme absolu n’est pas dangereux, bientôt plus d’un milliard de personnes habitant les zones côtières inhabitables, c’est la vie la vie, la vie extrême, zones d’émotion, négoces on dit inclusion sociale tu parles, si tu dis ce que tu sais tu entendras ce que tu ne veux pas, zones d’émotion, négoces, habiter où on désire, où vont les neiges de l’Himalaya, qui erre rêve, à quoi, condition que les tirs ne soient pas mortels, où sont les neiges de l’Himalaya, ils devenaient des bêtes à tuer, ils n’avaient pas éliminé un nombre substantiel d’hommes, la peau, faire du monde une surface plane
Lecteurs sursollicités. Fracassés, et titubant dans l’époque. Les rares ! Nous, qui en poésie, en étions restés à Cédric Demangeot. Les vivants, message personnel : Hope. Hope. Hope.