Pas toujours faire quelque chose de ce qu'on perçoit du vivant par Maxime Actis

Les Poèmes et Fictions, poésie contemporaine

Pas toujours faire quelque chose de ce qu'on perçoit du vivant par Maxime Actis

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Note-1 : pas toujours faire quelque chose de ce qu'on perçoit du vivant. Ouais sauf un poème minuscule qui parle de ne pas toujours faire quelque chose de ce qu'on perçoit du vivant, un poème qui serait pensé depuis l'intérieur du cerveau à cause de ce vivant vivant tout dehors, vivant de dehors puis avalé, déchiré, mâchouillé longuement, des journées entières qu'il pleuve ou vente ou que le crâne se tape une insolation, que ça cogne en couleurs derrière les paupières fermées et que le vivant comme la rivière après la crue, rétrécisse, disparaisse lentement. Il reste des cailloux dans la boue, dirait-on, c’est-à-dire un assemblage, plus ou moins adroit, de terre séchée, faisant apparaître mots, ponctuation, sauts de ligne, etc. Attention pas découper le réel. Attention, c’est quoi correctement le réel découpé en vers, le vivant dépecé comme un vieux canasson et découpé en petits vers adroits, mis sous plastique et virevoltants ou illisibles. Les poètes likent ça, et voilà, le bloc, ce qu’on appellerait « poème », ce qu’on appellerait « texte », tiens, OK, voilà. Un poème donc mais du vivant rogné, irrigué et aménagé, taillé, comme on enlèverait à un jeune fruitier ces branches mortes, voilà, un poème qui ne regarderait pas les feuilles des arbres bouger au vent sans rien dire, sans rien ajouter, un poème ne vérifiant qu'un minimum d'énoncés réflexifs tel que, par exemple, la difficulté à se lier à du vivant, vivant débordé par des rythmes différents que ceux du poème, tel que, par exemple, l'idée selon laquelle on ne se connecte pas au vivant car il n'y a pas de prise. Un poème qui aussi moins-valuesque qu'il le désirerait, n'y parviendrait pas. Note-2. : écrire un poème coudes sur caddie plastique envoyé sur Whatsapp : « le fromage blanc / +0,12 euros en 1 semaine / poèmes croissent pas si vite ». Alors un poème dont on préciserait en guise de note introductive qu'il faut le lire tel quel, c'est-à-dire comme il a été imprimé, c'est-à-dire comme il est là, c'est-à-dire comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’un écran LCD de smartphone fabriqué dans un pays sud-asiatique dans des conditions infectes, tandis que ce masque sur les yeux, d'un homme de 33 ans qui savait mais ne sait plus regarder un paysage, d'un vivant reremâchouillé & d'un lecteur scrollant quoi qu’il en dise des heures sur le fil tressé de 0 et 1 et 0 et 1 du monde reflétée. Note-3 : franchement l’image du tissage, c’est passable... Ouais, on préciserait en guise de note comme l'écrivait Emmanuel Hocquard à la fin de je-ne-sais-quel-livre (lui, il ne pouvait s'empêcher de faire rapporter à chacun de ces poèmes 0,6% d'intérêt, ce qui est tout de même un taux assez bas, mes respects éternels), « il faut le lire tel que c'est écrit ». Oui, faire ça. Pour le réel, pour le vivant, qui n’a rien demandé, vous comprenez.