Poèmes lus par la mer, de Luis Mizón par Christophe Stolowicki

Les Parutions

14 nov.
2022

Poèmes lus par la mer, de Luis Mizón par Christophe Stolowicki

  • Partager sur Facebook
Poèmes lus par la mer, de Luis Mizón

 

Lus par la mer, l’océan de nos ailleurs les plus proches, l’Atlantique ; l’amer viride, viril voire masculin de l’amitié (au panier toute interprétation psychanalytique) ; dédiés en 2020 au poète Frédéric Jacques Temple qui a pu les lire avant de mourir ; enrichis, nourris, illustrés (lustrés comme un oiseau ses plumes d’envol, en maintes relations paginales à l’écrit, non platement comme pratiqué par certains éditeurs, entre autres ceux de poésie jeunesse) par le peintre Alain Clément qui épand, en lettres et phrases du corps féminin abstrait, agrandi à l’épure, la sensualité de ses courbes mi-longues tout en jambes, de ses couleurs inscrites dans l’imaginaire débordant de vécu / invécu : 26 poèmes traduits par Claude Couffon, un lecteur imprégné qui nous en rend l’espagnol au plus limpide.

Publié en bilingue moteur. En couverture une fleur rouge danse sur l’océan de ses cinq pétales d’étoile de mer entrouverte sur son cœur de phrase.

Voyage. « Fruits du néant / tourbillons de paroles qui mûrissent / dans le pays de l’oubli / je voudrais me nourrir de toutes les choses qui s’en vont / et que je touche avant qu’elles ne soient / pièges et simulations » : plus parlant peut-être encore en espagnol ; la chute concrète, tranchante.

Voyage : « un demi-cercle de soldats / urine devant le soleil couchant / autour de la grande fontaine du patio / d’une immense maison close / dans les racines du vent ». À l’arrière-plan, la tentation du picaresque.

« Dans la lumière de nos conversations / certains mots arrivent en retard / ils le font exprès / ils m’attendent en cercle / loin d’ici / au bord des trous noirs de l’espace / que j’appelle / les étangs noirs de l’oubli ». Une vie en poésie d’imprégnation lente, de chaleur partagée, conjure sur le long cours le passage, « dans la fausse accalmie de la matière ».

Entre hommes, d’homme à homme. La parole fleurit, brasse les flots et les déserts. Avec ce déploiement strictement masculin, où toutefois ne s’échangent pas des portraits de maîtresses, contraste la diffuse, précise, exclamative, suspendue, joueuse, distendue du rouge au vert, de la pleine page à l’angle roulant, tout en tropes quand les poèmes sont d’abord une chambre d’échos – sexualité amoureuse, en rapport scriptural avec la maison d’en face, du peintre Alain Clément. 

L’éditeur lui a fait un très beau livre, avec des poèmes de qualité. Un joyau de bibliothèque, pensé, concis, profus, éclatant.

Quant à la femme, poète espagnol mon frère, encore un effort, camarade.  

 

Retour à la liste des Parutions de sitaudis