La tête en arrière de Violaine Schwartz par Nicole Caligaris

Les Parutions

22 oct.
2010

La tête en arrière de Violaine Schwartz par Nicole Caligaris

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Qu'est-ce que la précarité ? Un tempo.
C'est ce que fait éprouver le remarquable premier roman de Violaine Schwartz.
Une chanteuse y dévale la pente mentale qui lui fait perdre le réel. La composition est serrée, l'écriture sonore. Les vocalises, le son des mots, les phrases exogènes qui prennent dans le texte une forme de stridence, percent la narration comme les urgences fractionnent le temps d'une existence dont toutes les bases se dérobent au point que l'esprit flanche, que le corps ne tient plus. Ce phénomène de proche évanouissement donne son titre au livre, « la tête en arrière », où le lecteur est conduit sur la ligne de bord que passe progressivement la chanteuse, seul personnage et personnage seul, tous les autres, même « la petite », sa fille qui donne au récit sa polarité, sont laissés dans le flou, le monde réel, social est dans le flou, dont se détache un fantasme à la netteté hyper réaliste de héros de Comix.
Trois films, pour évoquer ce livre : Amore de Roberto Rossellini, d'après La Voix humaine de Cocteau, dont le monodrame composé par Francis Poulenc est explicitement cité dans le roman. On ne peut s'empêcher d'entendre Anna Magnani, seule avec un combiné téléphonique, passant par toutes les douleurs, dans une chambre fermée à laquelle se réduit le monde, où l'existence est une voix : le roman de Violaine Schwartz en donne une belle variation. On ne peut pas non plus s'empêcher de penser à la magistrale Gena Rowlands dans Une femmme sous influence de John Cassavetes. Enfin, je retrouve dans ce tempo d'une noyade, le formidable premier volet de la trilogie de Nicolas Winding Refn : Pusher.
Violaine Schwartz est comédienne et chanteuse, je l'ai entendue, dans un duo superbe avec Dominique Pifarély, interpréter Gherasim Luca, ça ne s'oublie pas.

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