Le Bonjour de Christopher Graham, de Guillaume Decourt par Christophe Stolowicki

Les Parutions

03 avril
2023

Le Bonjour de Christopher Graham, de Guillaume Decourt par Christophe Stolowicki

  • Partager sur Facebook
Le Bonjour de Christopher Graham, de Guillaume Decourt

 

Tout en pochades de sapide et salubre gaieté, associant avec un bondissant humour érudit rondeaux, ballades, sonnets, pantoums, savantes contre-rimes et rimes tierces, à  l’anglais des États-Unis le plus contemporain sinon californien ; accordant « cuit » avec « Q.I. » «  cookies » avec « déduisent », « ice-cream » avec « crime », « l’hôtel SW » avec « soie », celle d’un amour de Swann mais le retour sur la métrique contraignant de développer in extenso le « S double u » pour parfaire l’alexandrin ; faisant rimer « living-room » avec « Robert Mitchum » parce que le nom de l’acteur se prononce comme un éternuement ; complexe comme un Aragon grand voyageur ad majorem gloriam  de l’art naguère majeur ; actualisant l’envoi de ballade, à « Princesse » plutôt qu’à Prince de mots ; enchaînant sur une minuscule après rejet – en nous donnant d’outre-Atlantique, d’hôtel en motel d’un tourisme de grande envergure, Le Bonjour de Christopher Graham,  Guillaume Decourt  déploie une fois de plus, mais celle-ci d’instructive parade, la palette au grand complet de ses talents.

 

L’appétit des lecteurs de s’instruire plutôt que de lire détourné des « philosophes » si peu philosophes au profit des poètes et d’une authentique culture, il faut le saluer en retour.

 

« Je divague au Starbucks Coffee / / Je l’ai découvert à Pékin / Depuis je m’y rends à Paris / C’est mon plaisir américain / L’Europe me semble surie / Je l’ai découvert à Pékin // […] j’accuse /Tout homme de lettres qui s’use / Dans un vieux bistrot de quartier ». Un chansonnier de nouvelle génération parle là, voyageur planétaire heureusement nourri de grands classiques. Retourné comme une chausse le temps où Breton vendait le surréalisme aux Américains, le plus fertile des isthmes récents désormais barré à jamais, sombré dans un âge ingrat du passé.  

 

Désormais préservée des avant-gardes l’arrière-garde de l’armée des morts, Frank Venaille lui aussi cassé de son grade. Encore un effort, citoyen, pour être un vrai poète républicain (d’Amérique).  

 

Retour à la liste des Parutions de sitaudis