Alice, La Chasse au Snark  par Claude Minière

Les Incitations

3 nov.
2025

Alice, La Chasse au Snark  par Claude Minière

 

 

Imaginer à quoi ressemble la flamme d’une bougie une fois qu’on l’a soufflée, voici bien l’une des questions que se pose Alice .  Et une des bonnes nouvelles de cet automne pourrait bien être la parution des nouvelles traductions des trois Alice par Philippe Jaworski*. L’auteur de ces traductions et des notes accorde une grande attention à la forme du texte et cette disposition du lecteur est essentielle pour une complète adhésion au récit des aventures de la jeune héroïne et à celui de la chasse au Snark que Lewis Carroll publiera un peu plus tard (1876).  Alice sans cesse se pose la question de la forme des objets et des êtres qu’elle rencontre, de celle des tournures linguistiques et de la manière de dire correctement les choses. Dans La Chasse, le seul du four fantastique (The baker) qui aura vu le monstre est mort. Le corps de la jeune Alice change comme change celui des filles, le sens des formules change selon les détenteurs momentanés de l’autorité. Non seulement cette autorité se révèle être totalement arbitraire mais, de plus, ses détenteurs sont absurdement « chatouilleux » : she thougt to herself « I wish the creatures wouldn’t be so easily offended » (par exemple dans la confrontation avec le Caterpillar drogué au narguilé). C’est parce qu’ils sont dogmatiques que les personnages sont si promptement offensés.  Mais en réalité, on ne sait pas ce que devient une flamme, un jour d’été, un bord de mer ?  Que reste-t-il d’un corps aimé ?  Vite, imaginons, un conte ou un calligramme.

 

*Un volume bilingue de la Bibliothèque de La Pléiade, 962 pages, avec 207 illustrations.