MOUTON CONTRE ORANGE par Joseph Mouton

Les Incitations

04 janv.
2011

MOUTON CONTRE ORANGE par Joseph Mouton

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De : Joseph Mouton
Envoyé : jeudi 7 octobre 2010
À : JEAN-PAUL LEROUX UATSE
Objet : La clé des cauchemars


Cher Monsieur,


Dans la grande détresse électronique où je me trouve, je n'ai d'autre choix que de m'en rapporter à vous, car le 39 00 ne m'est d'aucun secours pratique et le 39 70 m'envoie méchamment bouler (me renvoie agressivement au 39 00). Il est vrai que j'essayais de savoir auprès d'Orange pourquoi, après acquisition d'une clé 3G, je ne pouvais toujours pas envoyer de messages internet (alors que je pouvais en recevoir). Un de mes amis qui s'y connaît m'a expliqué qu'il aurait sans doute fallu configurer je ne sais quoi dans mon ordinateur, de sorte qu'etc., mais que toujours est-il que ce n'est pas à vous, Orange, de vous occuper certainement de ces broutilles (mais bien moralement à moi, qui ai acheté cette fameuse clé : ah ! que je sois maudit pour avoir voulu passer un tel pacte faustien !). Morale de l'histoire : je vous rendrai la clé ensorcelée dès que vous consentirez à la reprendre (non sans avoir payé entre-temps, moi, des sommes sans doute disproportionnées, puisque mes diverses tentatives pour envoyer quand même des messages cet été ont dû me faire dépasser mon forfait horaire d'usage de clé (moi qui croyais naïvement que je disposais d'une durée illimitée)).
Non, cher Monsieur, laissons tomber mes problèmes de clé 3G. Je me résous à ne plus l'utiliser, jamais. C'est dit. Mais au moins, si vous pouviez m'aider à rétablir mon téléphone fixe, qui refuse depuis plus d'un mois de recevoir les appels de mes correspondants, vous seriez béni, cher Monsieur, oui : béni ! Redonnez-moi par exemple la marche à suivre (car il existe une procédure, je l'ai déjà utilisée (car cette panne m'est déjà arrivée (car je suis, cher Monsieur, parfaitement fataliste, veuillez le noter, et partant, parfaitement inoffensif et bénin vis-à-vis de la compagnie pour laquelle vous travaillez ; c'est-à-dire que j'accepte ces pannes régulières et tous les dysfonctionnements de vos produits (même de vos produits-phares, oserais-je le dire ?) sans broncher, comme issus d'une fatalité naturelle ou surnaturelle, mais en tout cas d'une nécessité implacable et supérieure dans laquelle vous, Orange, n'entrez pour rien et dont vous n'êtes pas coupable le moins du monde))) pour rétablir la moitié de ma liaison téléphonique (de mon téléphone fixe) avec le monde (grâce à Dieu, je peux toujours appeler mes correspondants de mon téléphone fixe (ce qui n'a pas toujours été le cas, je vous prie de le noter, cher Monsieur)).
Voilà, j'espère que vous pourrez faire quelque chose pour moi. Avant de vous laisser, permettez-moi de vous féliciter pour vos dernières publicités (je veux parler notamment des publicités Orange où l'on voit un employé Orange continuer à aider des anonymes rencontrés dans la rue après la fin de son service Orange, tellement le sens du service s'est développé chez lui au contact sans doute de la culture d'entreprise Orange, qui n'aura pas mené en vain tant de ses employés au suicide lors d'une "séquence précédente" (comme on dit couramment à la télévision de nos jours)) : ces publicités ont tellement peu de rapport avec la réalité qu'elles nous remontent le moral, vraiment, je vous assure, cher Monsieur ; nous pensons en effet qu'il existe un monde ou qu'il pourrait exister un monde dans lequel les employés Orange dépanneraient les clients Orange directement et efficacement, et cette considération ou pensée est aussi consolante que celle du Paradis l'était sans doute pour les chrétiens confrontés à l'enfer sur terre, - car nous autres petits clients d'Orange savons bien qu'ici-bas nous ne connaîtrons sans doute jamais ce grand esprit de dépannage bienfaisant que vos publicités savent si bien dépeindre, nous qui sommes voués à converser stérilement avec vos pauvres employés robotisés, anonymes et hypnotiques du 39 00 (qui nous parlent depuis la Mauritanie, la Tunisie, etc., ces contrées exotiques et bon marché (du point de vue de la main d'œuvre, j'entends) et tentent de nous endormir comme ils peuvent, les pauvres !).
Ne perdons pas le contact, donc, et soyez béni si vous pouvez me sortir de mon pétrin actuel !
Monsieur Mouton, un admirateur anonyme d'Orange.


De : Jean-Paul Leroux
Envoyé : 8 octobre 2010
À : Joseph Mouton.
Objet : Re : La clé des cauchemars


Bonjour,
Désolé pour tout ces déboires.
Donnez moi votre n° de fixe,
J'ai transmis votre mail à mes responsables
Cordialement
J.-P. L.


De : Joseph Mouton
Envoyé : 8 octobre 2010
À : Jean-Paul Leroux
Objet : Le faux espoir


Cher Monsieur,

Merci de me répondre. Voici mon numéro de fixe, comme vous me le demandez : /
au moment où j'écrivais cette ligne (au deux points exactement), vous avez appelé, miraculeusement. Le téléphone fonctionne donc, vous ai-je dit et me suis-je répété. Malheureusement, après avoir raccroché, j'ai composé mon propre numéro (le <04 93 ** ** **> entre parenthèses) et j'ai entendu "en raison d'une (je ne sais quoi), vous ne pouvez avoir accès à ce numéro", le message sur lequel tombent ordinairement mes correspondants ces temps-ci : serait-ce seulement grâce à votre influx magique personnel (ou orangien) que vous avez pu franchir un instant la barrière magnétique qui retient mon téléphone (fixe) prisonnier du silence ? Poursuivrez-vous vous-même vos efforts pour le libérer de ce sortilège ?
Bien à vous,
Monsieur Mouton


De : Jean-Paul Leroux
Envoyé : 12 novembre 2010
À : Joseph Mouton.
Objet : Re : Hannibal Tragique suivi de Hannibal domestique


Bonsoir,

Vos nouvelles électroniques mon quelque peut surpris.et ne voulant pas passer pour une chose impersonnelle,m'amenant à vous répondre de ma messagerie personnel.J'avais saisi votre manne verbale et votre maitrise de l'allocution,et même si je suis au regret de ne pas être la clef de vos cauchemars,et que je ne manie pas la plume d'où découle la senteur de l'ancre couchée sur le papier,
je tenais à saluer la parution de vos ouvrages,
dont vous avez bien voulu me faire part.

Cordialement
J.-P. L.