Un OS dans la carte pOStale, d’Olivier Domerg par Christophe Stolowicki

Les Parutions

11 févr.
2021

Un OS dans la carte pOStale, d’Olivier Domerg par Christophe Stolowicki

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Un OS dans la carte pOStale, d’Olivier Domerg

Pour un grand paysagiste, un accroc dans la carte postale est œuvre aussi salubre que les paysages de Balthus où la couleur contredit la perspective ou son absence, que ses natures mortes ressuscitant le velouté engouffrement du temps. Domerg, qui a fait œuvre et carrière dans le paysage, en déborde de toutes parts et plus singulièrement ici dans cet OS pour lequel il a choisi de découper en vers sa pure prose – plus réflexive sur le motif que descriptive – comme se découpe à la fenêtre d’une villa normande où il séjourne en premier plan de mer, pieds dans l’ô, l’Histoire : celle d’un à côté du débarquement allié, sa logistique, plutôt que ce qui s’encadre, à strates parallèles de ciel, mer, plage, parallélépipède noir, rambarde, et l’OS perpendiculaire d’une hampe de drapeau tricolore, sur la photographie de couverture prise par l’auteur abondant à son rôle d’ « artiste ».

Son séjour à Arromanches, à rapprocher d’une résidence de poète, appelle l’évocation du « pointillé de “caissons” en béton armé, / Longs et impressionnants parallélépipèdes, / Que les alliés remorquèrent, à la veille / du “Jour J”, sur cent soixante kilomètres, / Pour les couler, à la queue leu leu, au large///D’Arromanches, créant ainsi une digue et / Un port artificiel – qui permit, en quelques / Jours, de débarquer sur le sol de Normandie, / Hommes, véhicules, vivres et munitions  […] du port Winston, il ne reste que quelques “blocs”, / Au loin et sur les côtés, plus ou moins intacts, / Malmenés qu’ils sont par tempêtes et marées, / Et la rouille qui éclate leur ferraillage. »

La vision idyllique première, l’observation du « vol des mouettes ou des cormorans […] des goélands ; / Et le déboulé voltigeur des martinets », secondées par le pan d’Histoire, ne portent leur livrée de poésie prosaïque qu’en préambule, en appel du pied à la charge ultime contre l’envers de la carte postale, son sombre fond : l’ « autre forme de guerre […] à coup d’extensions / Commerciales ou urbaine, d’enkystements /// Pavillonnaires, mitages exponentiels ; / Défigurations en tous genres et en tous lieux ; / Grignotages sans fin d’espaces naturels ; / Disparition d’espèces animales et / Végétales ».

 En contrepoint de son œuvre et en repliant son compas, Domerg dénonce les vandales du paysage.     

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