Diplomatiques de Guillaume Decourt par Jean-Paul Gavard-Perret

Les Parutions

26 juin
2015

Diplomatiques de Guillaume Decourt par Jean-Paul Gavard-Perret

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La poésie légère d’un jeune homme sérieux

 

 

 

L’écriture de Guillaume Decourt saisit par sa maturité. J’avoue ma surprise lorsque j’ai vu que l’auteur avait à peine 30 ans. L’allusion dans un texte (« Contrerime de coda ») au Iphone aurait pu me mettre comme on dit  « la puce à l’oreille ». Mais  rien d’enfantin, de naïf ou de « pittoresque à rebours » dans ces instants d’année. Tout est dominé de manière fractale. Les marbres sont enlevés au profit de boules de vie. Elles se déplacent d’une page à l’autre entre les différents espaces-temps qu’a déjà connus le poète dont la virtuosité poétique rejoint celle de sa pratique musicale. Decourt saisit le réel par les cornes mais toujours avec légèreté et parfois détachement (lorsque cela s’impose).

Le diable se faufile ça et là dans les souvenirs mais de manière émouvante. Episodes musicaux (leçon de musique, concours), vie dans les ambassades, la servante philippine, etc.  tout est traité avec le juste détachement. Le poète n’en fait jamais des tonnes, il trouve la bonne focale avec une rigueur qui n’a rien de roide. C’est là l’écriture grave d’un homme en fête, celle légère d’un être qui a une idée des valeurs les plus simples. Celui qui se décrit tel « petit au regard de faune / un jour d’Intifada » transgresse le sacré sans la moindre profanation.

 Toute situation est marquée du sceau de l’ambivalence. Si bien que l’œuvre ouvre à la réflexion face à une division bipolaire du monde. L’œuvre ne glisse rien sous le tapis mais évite le scepticisme qui embrume trop souvent la poésie. Avec Decourt elle est sûre de son coup : sans doute parce qu’elle refuse l’ambiguïté ou la provocation et préfère la bienveillance amusée. Celle-ci fonde la poétique et l’éthique.  Ce qui pour beaucoup aurait pu être perçu comme une ombre passagère sans importance trouve chez Decourt une forme de quintessence en rien statique. Le poème ne fonctionne pas comme un piège de la pensée :  il  l’ouvre. Face à l’anéantissement du monde l’auteur  cultive une solarité particulière. Elle n'efface pas le temps elle l’engendre avec juste ce qu’il faut de décalage dans le motif au sein d’un décrochement visuel amusé mais profond.

 

 

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