nos tours, sorties des pins (les élèves de 4e5 avec Maxime Actis & Yohanne Lamoulère) par Nathalie Quintane

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02 juil.
2024

nos tours, sorties des pins (les élèves de 4e5 avec Maxime Actis & Yohanne Lamoulère) par Nathalie Quintane

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nos tours, sorties des pins (les élèves de 4e5 avec Maxime Actis & Yohanne Lamoulère)

Si vous ne comprenez pas toujours (c’est mon cas) ce qu’est, ce que serait, ce que peut être une « politique de la littérature », voilà un petit livre précieux. 

 

Un livret, édité impeccable par les Presses Séparées de Marseille, où se succèdent entretiens, portraits, abécédaire, poèmes et rêves (poèmes de réels et poèmes de rêves) écrits par des adolescents regroupés dans une classe, elle-même inclue dans un établissement scolaire nommé collège (tranche d’âge : onze à quinze ans), situé à Marseille, dans ce qu’on appelle rapidement les quartiers nord. Le tout constitue le premier volet des archives du quartier ; ces archives, cette mémoire, qui manquent tant à des quartiers sans cesse en voie de transformation ou plutôt de démolition (le livret y insiste), ce sont ses jeunes qui vont les constituer année après année, 

 

En vers courts :

 

Depuis que tout le monde

Est parti

Plus rien. 

(Beya)

 

Chez moi, dormir

Me réveiller

Aller en cours

Retour chez moi

Ma vie est une boucle infinie

Je n’en vois pas le fond

(Chérazade)

 

Comme des haï-kaïs crus :

 

Dans la forêt il y a des arbres,

Des déchets, des feuilles,

Chaque jour il y a des chasseurs

Et ils ramènent des animaux plein

De sang

 

C’est trop satisfaisant de voir

Du sang couler

D’un sanglier

(Sarah) 

 

Des phrases situées, frontales : 

 

J’ai rêvé de me faire percuter et d’être dans le coma pour voir la sensation. (Beya)

 

Dans dix ans, je vais me marier à Bernard Arnault le PDG de Louis Vuitton, Guerlain, etc. 

Pour le tuer et avoir son héritage. 

 

De ces deux dernières phrases, l’une a été censurée (j’ai dans les mains l’édition non-censurée du livret); laquelle ? 

 

Le seconde, bien entendu, car le fait qu’un jeune des quartiers rêve (ou plutôt pense) sa mort après avoir été percuté pose visiblement moins de problème que le rêve (ici, le fantasme) de tuer l’un des hommes les plus riches du monde pour avoir son héritage (et Dieu sait si ce rêve est au fond commun à une partie de la population française, y compris hors quartiers).

 

Et puis passe, comme en contrebande, pourtant écrit bien clair mais que les censeurs n’ont pas vu (sans doute parce qu’ils ne comprennent pas bien ce que la littérature relève, ce pour quoi elle se fait et continue à se faire) la véritable démolition : 

 

« On avait tout dans le quartier, on avait tout ici. On n’avait pas besoin de sortir ; c’était plus un village familial qu’un quartier. Ils ont mis nos parents qui sont arrivés du Maghreb, ils ont voulu les mettre à part, sur une colline. A mon avis, on était tellement bien unis entre nous, qu’ils ont voulu détruire tout ça. »

 

Et l’allusion terrible :

 

« (…) Studio B-Vice, premier studio de rap à Marseille (du nom du groupe dans lequel il y avait Ibrahim Ali, le jeune qui s’est fait tuer par les colleurs d’affiches du Front National) ». 

 

Une histoire française, en somme, car l’intérêt de ces archives dépasse largement le seul quartier dont elles sont censées rendre compte. 

 

Il reste peu d’exemplaires. Vous pouvez les commander :  coq33licot@riseup.net

 

Ou contribuer ici

 https://www.helloasso.com/associations/foyer-fse-college-vallon-des-pins/formulaires/1

 

Pour que les élèves puissent faire un (petit) voyage. 

 

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